Niveau de réduction d’utilisation et/ou d’impact potentiel
Le projet « Gargamel – Gestion Agroécologique des Ravageurs de Grandes cultures À l’aide de Mélanges floraux » piloté par l’INRAE et AgroParisTech a montré que les bandes fleuries réduisent les quantités de criocères des céréales et les quantités de pucerons de 30 à 50 % sur orge et pois, mais pas ou peu les pucerons du colza. Les bandes fleuries contribuent à augmenter les taux de parasitisme de nombreux ravageurs (pucerons, méligèthes, altises) sur des distances allant jusqu’à 100m de la bande. Il s’agit d’abord d’inciter à la modification des pratiques des agriculteurs en prenant mieux en compte les dynamiques auxiliaires-prédateurs avant d’utiliser des moyens de lutte conventionnels. Cette démarche pourrait s’intégrer dans le dispositif de Protection intégrée des cultures (PIC).
Freins à lever et conditions de réussite
L’effet des bandes fleuries pour une réduction des usages phytosanitaires varie selon les contextes paysagers (densité de culture cible dans le paysage, nombre d’aménagements linéaires ou surfaciques …) et météorologiques. La technique engage les agriculteurs dans une démarche plus vertueuse et un usage moins prophylactique des phytosanitaires, sans leur garantir un résultat efficace d’une année sur l’autre. L’effet des auxiliaires impacte souvent la génération suivante de ravageurs (année N+1) : en parasitant les larves de ravageurs, les auxiliaires émergent l’année suivante au détriment de l’adulte ravageur impactant ainsi sur la densité de la population en année N+1. Il est possible de maximiser la présence des insectes auxiliaires en choisissant une composition du couvert herbacé et floristique adaptée au contexte pédoclimatique et aux ravageurs ciblés. La composition doit être diversifiée et basée en majorité sur des plantes dicotylédones de familles diverses et variées. Cette mixité de plantes à fleurs est intéressante car elle permettra une floraison étalée le plus longtemps possible. Les floraisons précoces permettront l’arrivée tôt en saison des auxiliaires en amont des arrivées de ravageurs. La mise en place de couverts pluriannuels permet d’assurer ces floraisons précoces et fournit également des sites d’hibernation pour les auxiliaires.
Une bande, si elle est isolée, n’aura que très peu d’effet. Il est préférable d’apporter une diversité et plusieurs aménagements connectés entre eux plutôt qu’une grosse surface isolée. Cette répartition va favoriser la circulation des espèces et l’action de régulation sur l’ensemble de l’exploitation, puisque l’action des auxiliaires diminue en s’éloignant de la bande (plus d’effet de la bande au-delà de 100 mètres [2]). Les agriculteurs auront besoin d’outils de diagnostic leur permettant d’apprécier, à la parcelle, les seuils d’interventions éventuels lorsque la pression des prédateurs devient trop forte. Le coût des semences florales n’est pas à négliger mais s’amortit sur la durée de vie du couvert (3 à 8 ans pour certains couverts). Le bénéfice à attendre d’une mise en place à large échelle est de stabiliser les populations d’auxiliaires pour fiabiliser et accélérer leur arrivée dans les nouvelles bandes installées. Les contraintes réglementaires liées à la PAC peuvent être un frein technique mais à l’inverse, la reconnaissance des jachères mellifères en SIE est un atout pour inciter les agriculteurs à implanter des bandes fleuries. Enfin, la reconnaissance d’une fiche CEPP « bandes fleuries » favoriserait l’émergence de cette technique.
Surcoût et/ou gain de la solution
S’il est possible d’évaluer le coût d’implantation des bandes fleuries et des surfaces dédiées, il est cependant difficile d’estimer la baisse de l’utilisation des produits phytosanitaires et les gains issus des services écosystémiques impactant le rendement, variables selon les années, et donc la charge en moins pour les agriculteurs.
Impact santé / organisation du travail / pénibilité
La mise en place d’une bande enherbée fleurie améliorera le cadre de vie, contribuera à la beauté du paysage, accroîtra le potentiel de régulation naturelle des ravageurs et limitera les transferts de matières actives. Elle ne nécessitera pas de temps de travail particulier si ce n’est le semis, un écimage/broyage localisé en cas de salissement et un broyage hivernal pour favoriser le recouvrement et redynamiser la floraison. En fonction du mélange choisit, le semis pourra se faire au printemps ou à l’automne, il pourra être annuel ou pluriannuel.
[2]ALBRECHT, Matthias, KLEIJN, David, WILLIAMS, Neal M., et al. L'efficacité des bandes fleuries et des haies vives sur la lutte antiparasitaire, les services de pollinisation et le rendement des cultures : une synthèse quantitative. Lettres d'écologie, 2020, vol. 23, n° 10, p. 1488-1498.