Niveau de réduction d’utilisation et/ou d’impact potentiel
Le projet « Gargamel – Gestion Agroécologique des Ravageurs de Grandes cultures À l’aide de Mélanges floraux » 7 8 9 piloté par l’INRAE et AgroParisTech a montré que les bandes fleuries réduisent les quantités de criocères des céréales et les quantités de pucerons de 30 à 50 % sur orge et pois, mais pas ou peu les pucerons du colza. Les bandes fleuries contribuent à augmenter les taux de parasitisme de nombreux ravageurs (pucerons, méligèthes, altises) sur des distances allant jusqu’à 100m de la bande.
Il est cependant difficile d’estimer la baisse de l’utilisation des produits phytosanitaires et les gains issus des services écosystémiques impactant le rendement, variables selon les années, et donc la charge en moins pour les agriculteurs.
Il s’agit d’abord d’inciter à la modification des pratiques des agriculteurs en prenant mieux en compte les dynamiques auxiliaires-prédateurs avant d’utiliser des moyens de lutte conventionnels. Pour être efficace, cette démarche doit s’intégrer dans une logique de Protection intégrée des cultures (PIC) consistant à combiner tous les leviers agronomiques possibles pour se prémunir des attaques de ravageurs et de leurs dégâts (décalage de date de semis, cultures associées, plantes compagnes etc.).
Surcoût et/ou gain de la solution
Il est possible d’évaluer le coût d’implantation des bandes fleuries et des surfaces dédiées. Il est en revanche difficile de chiffrer le gain qui dépend beaucoup du contexte paysager, de l’année, etc.
Impact santé / organisation du travail / pénibilité / environnement
La mise en place d’une bande enherbée fleurie améliorera le cadre de vie, contribuera à la beauté du paysage, accroîtra le potentiel de régulation naturelle des ravageurs et limitera les transferts de matières actives.
Elle nécessitera un peu de temps de travail pour le semis, un écimage/broyage localisé en cas de salissement et un broyage hivernal pour favoriser le recouvrement et redynamiser la floraison. En fonction du mélange choisi, le semis pourra se faire au printemps ou à l’automne, il pourra être annuel ou pluriannuel.
Freins à lever et conditions de réussite
L’analyse de la performance des bandes fleuries est complexe et dépend de plusieurs paramètres :
- Les structures paysagères présentes (effets de dilution/concentration des auxiliaires selon la densité d’éléments paysagers)
- Des événements météorologiques (année favorable ou non aux ravageurs et aux auxiliaires)
- L’impact de la prédation ou du parasitisme sur la dynamique de population des ravageurs (l’action de l’auxiliaire peut jouer sur la génération suivante des ravageurs)
La performance des bandes fleuries pour une régulation naturelle doit donc être évaluée à partir d’une base commune et d’une boîte à outils à construire.
L’effet des bandes fleuries pour une réduction des usages phytosanitaires varie selon les contextes paysagers (densité de culture cible dans le paysage, nombre d’aménagements linéaires ou surfaciques …) et météorologiques.
La technique engage les agriculteurs dans une démarche plus vertueuse et un usage moins prophylactique des phytosanitaires, sans leur garantir un résultat efficace d’une année sur l’autre.
L’effet des auxiliaires n’est pas toujours immédiat. En effet dans certains cas, les auxiliaires (c’est surtout le cas des parasitoïdes, mais également de prédateurs tardifs) n’ont pas d’effet sur les ravageurs en année N mais uniquement sur l’émergence des ravageurs en année N+1 et donc l’infestation des cultures en année N+1.
Il est possible de maximiser la présence des insectes auxiliaires en choisissant une composition du couvert herbacé et floristique adaptée au contexte pédoclimatique et aux ravageurs ciblés. La composition doit être diversifiée et basée en majorité sur des plantes dicotylédones de familles diverses et variées. Cette mixité de plantes à fleurs est intéressante car elle permettra une floraison étalée le plus longtemps possible. Les floraisons précoces permettront l’arrivée tôt en saison des auxiliaires, (par exemple, les parasitoïdes d’altises d’hiver volent en février) en amont des arrivées de ravageurs. La mise en place de couverts pluriannuels permet d’assurer ces floraisons précoces et fournit également des sites d’hibernation pour les auxiliaires.
Il est préférable d’apporter une diversité et plusieurs aménagements connectés entre eux plutôt qu’une importante surface isolée. Cette répartition va favoriser la circulation des espèces et l’action de régulation sur l’ensemble de l’exploitation, puisque la plus-value de régulation permise par la bande se réduit à mesure qu’on s’en éloigne (effet notable essentiellement sur quelques dizaines de mètres 10).
À moyen terme, les agriculteurs auront besoin d’outils de diagnostic leur permettant d’apprécier, à la parcelle, les seuils d’interventions éventuels lorsque la pression des prédateurs devient trop forte pour être contrôlée par les auxiliaires. Ce genre d’outil pourrait reposer sur des observations terrain de ravageurs et d’auxiliaires par l’agriculteur, mais préférentiellement sur des suivis en temps réel des populations de ravageurs et d’auxiliaires. Ces suivis sont technologiquement envisageables, mais encore loin d’être opérationnels pour des usages massifs.
Le coût des semences florales n’est pas à négliger mais s’amortit sur la durée de vie du couvert (3 à 8 ans pour certains couverts). Le bénéfice à attendre d’une mise en place à large échelle est de stabiliser les populations d’auxiliaires pour fiabiliser et accélérer leur arrivée dans les nouvelles bandes installées.
Les contraintes réglementaires liées à la PAC peuvent être un frein technique mais à l’inverse, la reconnaissance des jachères mellifères en Infrastructures Agro-Écologiques (IAE) est un atout pour inciter les agriculteurs à implanter des bandes fleuries.
L’aménagement idéal n’existe pas. L’important est de privilégier une diversité d’aménagements répartis sur l’ensemble du territoire (Figure n°1).

Figure n° 1 : Un paysage agricole favorable aux pollinisateurs (Crédit : © Agence La distillerie, Contrat de solutions)